Une vie ordinaire (extrait), de Georges Perros (26/01/2011)

 

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Si j’écris au plus près des mots
leur laissant toute latitude
de me trahir (c’est ce qu’ils font
dès qu’on leur ouvre un peu la porte)
c’est évidemment volontaire
Je pourrais sans doute de biais
t’interrompre banal discours
et prêter à penser aux jours
qui donneraient sens aux ténèbres
Je n’en suis pas là quoique aimant
ceux dont le langage inspiré
demandait pour mieux respirer
d’être ainsi traité Espérons
que cela me sera possible
c’est si beau une page blanche
Et tous ces mots prêts à sortir
du dictionnaire on n’a qu’à prendre
Vrai tous les mots de Moby Dick
ou de la Bible pourquoi pas
sont à portée de toute tête
et l’aphorisme de Pascal
Tout est là Malheureusement
chacun d’entre nous n’a pouvoir
que de parler son seul langage
A quoi bon vouloir être un autre
qui nous fascina par ses mots
il en a souffert la richesse
assumons notre pauvreté
Beaucoup d’écrivains d'aujourd’hui
sont gosses de riches ainsi
Ils choisissent dans la vitrine
le dernier cri sans pour autant
perdre leur bonne mine Allant
de fleur en fleur très littéraires
butinant au gré de leur goût
très sûr au reste mais vicieux.

 

Georges Perros, Une vie ordinaire, Poésie / Gallimard, 1988, p.90

Tableau de Jonathan Wolstenholme

19:27 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie et couleurs, une vie ordinaire, george perros, blanc, blanche |  Facebook |  Imprimer | | Pin it! |