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29/10/2015

Lettre en Novembre, de Sylvia Plath

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La balle orange, Silvia Bar-am

 

Mon amour, le monde

Tourne, le monde se colore. Le réverbère

Déchire sa lumière à travers les cosses

Du cytise ébouriffé à neuf heures du matin.

C’est l’Arctique,

 

Ce petit cercle noir,

Ses herbes fauves et soyeuses — des cheveux de

bébé.

L’air devient vert, un vert

Très doux et délicieux.

Sa tendresse me réconforte comme un bon édre-

don.

 

Je suis ivre, bien au chaud.

Je suis peut-être énorme,

Si bêtement heureuse

Dans mes bottes en caoutchouc,

A patauger dans ce rouge si beau, à l’écraser.

 

Je suis ici chez moi

Deux fois par jour

J’arpente ma terre, je flaire

Le houx barbare,

Son fer viride et pur,

 

Et le mur des vieux cadavres

Je les aime.

Je les aime comme l’histoire.

Puis les pommes d’or,

Imagine —

 

Imagine mes soixante-dix arbres

Dans une épaisse et funèbre soupe grise

Occupés à retenir leurs balles d’or éclatant,

Leur million

De feuilles métalliques haletantes.

 

Ô amour, ô célibat.

Je suis seule avec moi,

Trempée jusqu’à la taille.

L’or irremplaçable

Saigne et s’assombrit, gorge des Thermopyles.

 

Ariel, p 62 et 63, présentation et traduction de Valérie Rouzeau, Collection Poésie, Editions Gallimard