11/01/2011
Laurence endormie, de Patrice de LA TOUR DU PIN
Cette odeur sur les pieds de narcisse et de menthe,
Parce qu'ils ont foulé dans leur course légère
Fraîches écloses, les fleurs des nuits printanières,
Remplira tout mon cœur de ses vagues dormantes ;
Et peut-être très loin sur ses jambes polies,
Tremblant de la caresse encor de l'herbe haute,
Ce parfum végétal qui monte, lorsque j'ôte
Tes bas éclaboussés de rosée et de pluie ;
Jusqu'à cette rancœur du ventre pâle et lisse
Où l'ambre et la sueur divinement se mêlent
Aux pétales séchées au milieu des dentelles
Quand sur les pentes d'ombre inerte mes mains glissent,
Laurence... Jusqu'aux flux brûlants de ta poitrine,
Gonflée et toute crépitante de lumière
Hors de la fauve floraison des primevères
Où s'épuisent en vain ma bouche et mes narines,
Jusqu'à la senteur lourde de ta chevelure,
Éparse sur le sol comme une étoile blonde,
Où tu as répandu tous les parfums du monde
Pour assouvir enfin la soif qui me torture !
1942, La Quête de joie
Tableau de Cranach, 1518
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16/12/2010
Le Christ voilé (extrait), de Patrice de la Tour du Pin
C'est un jardin secret et tranquille où s'amassent
Les iris blancs et les hautes touffes d'asters
Et les tapis serrés de campanules basses.
Aucun vent n'y pénètre du ciel grand ouvert ;
Les voix mêmes des oiseaux passants se sont tues
Qui volent vite et très haut dans le ciel clair.
Ombrée, et finement travaillée, et vêtue
De la seule caresse amoureuse des fleurs,
Une femme, de la chair froide des statues.
Et le maître ancien qui fut son ciseleur,
A l'étrange figure ajouta son mystère,
Le signe de l'ellipse inscrit dans sa pâleur.
Un mur de pierre enclôt cette Eve solitaire
Qui ne tend pas l'oreille aux rumeurs d'au-delà,
Mais à celles, sourdes et profondes, de la terre.
Ce serait la plus haute des fleurs, si son bras
Le long d'un corps gonflé de sève végétale,
Sur son ventre de nacre ne descendait pas ;
Si ses deux seins n'étaient striés de veines pâles,
S'ils ne se gonflaient pas soudain de volupté,
Caressés seulement en rêve par un mâle.
C'est un jardin secret, cerclé d'un mur, hanté
Comme un damier, d'oiseaux noirs et blancs qui reposent :
On leur a coupé les ailes par cruauté.
Dehors le ciel est tout enluminé de rose,
Sur les collines, des nuages clairsemés,
Et "Quête de joie" est inscrit sur toutes choses :
L'archange noir, veillant sur ce jardin fermé.
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