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07/12/2014

Eloge du lointain, de Paul Celan

 

strindberg.jpg

 

August Strindberg, (1849-1912) Packis in Stranden (huile sur toile, 1892)

 

 

Dans la source de tes yeux

vivent les nasses des pêcheurs de la mer délirante.

Dans la source de tes yeux

la mer tient sa parole.

 

J´y jette,

coeur qui a séjourné chez les humains,

les vêtements que je portais et l´éclat d´un serment :

 

Plus noir au fond du noir, je suis plus nu.

Je ne suis, qu´une fois rénégat, fidèle.

Je suis toi, quand je suis moi.

 

Dans la source de tes yeux

Je dérive et rêve de pillage.

 

Une nasse a capturé dans ses mailles une nasse :

nous nous séparons enlacés.

 

Dans la source de tes yeux

un pendu étrangle la corde.

 

 

Paul Celan, Choix de poèmes, traduction Jean-Pierre Lefebvre, Poésie/Gallimard

 

11/11/2011

Matière de Bretagne, de Paul Celan

 

duquoc902.jpg


Lumière de genêt, jaune, les pentes
suppurent vers le ciel, l'épine
courtise la plaie, cela
sonne là-dedans, c'est le soir, le néant
roule ses mers à la prière,
la voile de sang fait route vers toi.

Sec, envasé,
le lit derrière toi, enjonque
son heure, en haut,
près de l'étoile, les ruisselets
laiteux babillent dans la boue, datte de pierre
en contrebas, buissonnante, bée dans le bleu,
un arbrisseau d'éphémère, superbe,
salue ta mémoire.

(Me connaissiez-vous,
mains ? J'allai
le chemin fourchu que vous marquiez, ma
bouche crachait ses galets, j'allai,
mon temps, surplomb neigeux en marche,
jetait son ombre – me connaissez-vous ?)

Mains, la plaie
courtisée par l'épine, cela sonne,
mains, le néant, ses mers,
mains, dans la lumière de genêt, la
voile de sang
fait route vers toi.


Poèmes, traduction par john E Jackson Editions José Corti

Jean Duquoc 73x92 cm. Acrylique .Lumière et Solitude.

02/06/2011

Eloge du lointain, de Paul Celan

 

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Dans la source de tes yeux
vivent les nasses des pêcheurs de la mer délirante.
Dans la source de tes yeux
la mer tient sa parole.

J’y jette,
cœur qui a séjourné chez des humains,
les vêtements que je portais et l’éclat d’un serment :

Plus noir au fond du noir, je suis plus nu.
Je ne suis, qu’une fois renégat, fidèle.
Je suis toi, quand je suis moi.

Dans la source de tes yeux
je dérive et rêve de pillage.

Une nasse a capturé dans ses mailles une nasse :
nous nous séparons enlacés.

Dans la source de tes yeux
un pendu étrangle la corde.


Paul Celan, Pavot et mémoire in Choix de poèmes réunis par l’auteur (édition bilingue), Gallimard, Collection Poésie, 1998, page 43. Traduction de Jean-Pierre Lefebvre.

Dessin de Federico Garcia Lorca