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18/03/2015

Dans la forêt, de Germain Nouveau

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 Ohara Koson

 

Dans la forêt étrange c’est la nuit ;
C’est comme un noir silence qui bruit ;

Dans la forêt, ici blanche et là brune,
En pleurs de lait filtre le clair de lune.

Un vent d’été, qui souffle on ne sait d’où,
Erre en rêvant comme une âme de fou ;

Et, sous des yeux d’étoile épanouie,
La forêt chante avec un bruit de pluie.

Parfois il vient des gémissements doux
Des lointains bleus pleins d’oiseaux et de loups ;

Il vient aussi des senteurs de repaires ;
C’est l’heure froide où dorment les vipères,

L’heure où l’amour s’épeure au fond du nid
Où s’élabore en secret l’aconit ;

Où l’être qui garde une chère offense,
Se sentant seul et loin des hommes, pense.

- Pourtant la lune est bonne dans le ciel
Qui verse, avec un sourire de miel,

Son âme calme et ses pâleurs amies
Au troupeau roux des roches endormies.

Pièce parue à la Renaissance, le 14 septembre 1873.
 

01/11/2013

Les oies sauvages, de Mary Oliver

 

Ohara Koson.jpg

Huit Oies rieuses en vol, la pleine lune derrière, de Ohara Koson


Vous n’avez pas à traverser à genoux

Vous n’avez pas à être sages.

des centaines de kilomètres de désert, en repentance.

Vous avez juste à laisser le doux animal de votre corps

aimer ce qu’il aime.

Parlez-moi du désespoir, le vôtre, je vous parlerai du mien.

Pendant ce temps le monde avance.

Pendant ce temps le soleil et les limpides galets de pluie

traversent les paysages,

survolent les plaines et les forêts profondes,

les montagnes et les rivières.

Pendant ce temps les oies sauvages, là-haut dans le pur air bleu,

sont sur le chemin du retour.

Qui que vous soyez, en quelque solitude,

le monde s’offre à votre imagination,

vous appelle comme les oies sauvages, rude et passionnant —

et indéfiniment signale votre place

dans la famille des choses.

                                       *

Wild Geese 

You do not have to be good. 
You do not have to walk on your knees 
for a hundred miles through the desert, repenting. 
You only have to let the soft animal of your body

 love what it loves. 
Tell me about despair, yours, and I will tell you mine. 
Meanwhile the world goes on. 
Meanwhile the sun and the clear pebbles of the rain 
are moving across the landscapes, 
over the prairies and the deep trees, 
the mountains and the rivers. 
Meanwhile the wild geese, high in the clean blue air, 
are heading home again. 
Whoever you are, no matter how lonely, 
the world offers itself to your imagination, 
calls to you like the wild geese, harsh and exciting —
over and over announcing your place 
in the family of things.

 

Mary Oliver, "Wild Geese", extrait de Dream Work, The Atlantic Monthly Press, 1986, p. 14. Traduction inédite de Chantal Tanet et Melissa Nickerson.

Texte à retrouver sur le blog Littératuredepartout