Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

19/03/2015

Sonnet d'été, de Germain Nouveau

 

14451_268671619922893_1212494474_n.jpg

Nous habiterons un discret boudoir, 
Toujours saturé d'une odeur divine, 
Ne laissant entrer, comme on le devine, 
Qu'un jour faible et doux ressemblant au soir.

Une blonde frêle en mignon peignoir 
Tirera des sons d'une mandoline, 
Et les blancs rideaux tout en mousseline 
Seront réfléchis par un grand miroir.

Quand nous aurons faim, pour toute cuisine 
Nous grignoterons des fruits de la Chine, 
Et nous ne boirons que dans du vermeil ;

Pour nous endormir, ainsi que des chattes 
Nous nous étendrons sur de fraîches nattes ; 
Nous oublirons tout, — même le soleil !
 

Poésies d'Humilis et vers inédits et tableau de Paul Delvaux

 

18/03/2015

Dans la forêt, de Germain Nouveau

moon-and-blue-flowers.jpg

 Ohara Koson

 

Dans la forêt étrange c’est la nuit ;
C’est comme un noir silence qui bruit ;

Dans la forêt, ici blanche et là brune,
En pleurs de lait filtre le clair de lune.

Un vent d’été, qui souffle on ne sait d’où,
Erre en rêvant comme une âme de fou ;

Et, sous des yeux d’étoile épanouie,
La forêt chante avec un bruit de pluie.

Parfois il vient des gémissements doux
Des lointains bleus pleins d’oiseaux et de loups ;

Il vient aussi des senteurs de repaires ;
C’est l’heure froide où dorment les vipères,

L’heure où l’amour s’épeure au fond du nid
Où s’élabore en secret l’aconit ;

Où l’être qui garde une chère offense,
Se sentant seul et loin des hommes, pense.

- Pourtant la lune est bonne dans le ciel
Qui verse, avec un sourire de miel,

Son âme calme et ses pâleurs amies
Au troupeau roux des roches endormies.

Pièce parue à la Renaissance, le 14 septembre 1873.
 

28/02/2015

En forêt, de Germain Nouveau

  

Paul Klee tropical-twilight-1921(1).jpg

Paul Klee, Tropische Dämmerung, 33.5 x 23 cm, 1921

 

 

Dans la forêt étrange, c'est la nuit ; 

C'est comme un noir silence qui bruit ; 

  

Dans la forêt, ici blanche et là brune, 

En pleurs de lait filtre le clair de lune. 

  

Un vent d'été, qui souffle on ne sait d'où, 

Erre en rêvant comme une âme de fou ; 

  

Et, sous des yeux d'étoile épanouie, 

La forêt chante avec un bruit de pluie. 

  

Parfois il vient des gémissements doux 

Des lointains bleus pleins d'oiseaux et de loups ; 

  

Il vient aussi des senteurs de repaires ; 

C'est l'heure froide où dorment les vipères, 

  

L'heure où l'amour s'épeure au fond du nid, 

Où s'élabore en secret l'aconit ; 

  

Où l'être qui garde une chère offense, 

Se sentant seul et loin des hommes, pense. 

  

— Pourtant la lune est bonne dans le ciel, 

Qui verse, avec un sourire de miel, 

  

Son âme calme et ses pâleurs amies 

Au troupeau roux des roches endormies. 

  

  

  

  

L'Amour de l'amour, Choix et présentation par Jacques Brenner, La Différence, 1992

 

 

 

 

08/10/2011

Un peu de musique, de Germain NOUVEAU (1851-1920)


odilon redon nuit.jpg

Une musique amoureuse 
Sous les doigts d'un guitariste 
S'est éveillée, un peu triste, 
Avec la brise peureuse ;

Et sous la feuillée ombreuse 
Où le jour mourant résiste, 
Tourne, se lasse, et persiste 
Une valse langoureuse.

On sent, dans l'air qui s'effondre, 
Son âme en extase fondre ; 
- Et parmi la vapeur rose

De la nuit délicieuse 
Monte cette blonde chose, 
La lune silencieuse.

 

Œuvres complètes, jointes à celles de Lautréamont,GallimardBibliothèque de la Pléiade 

Tableau Nuit d'Odilon Redon