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01/11/2013

Les oies sauvages, de Mary Oliver

 

Ohara Koson.jpg

Huit Oies rieuses en vol, la pleine lune derrière, de Ohara Koson


Vous n’avez pas à traverser à genoux

Vous n’avez pas à être sages.

des centaines de kilomètres de désert, en repentance.

Vous avez juste à laisser le doux animal de votre corps

aimer ce qu’il aime.

Parlez-moi du désespoir, le vôtre, je vous parlerai du mien.

Pendant ce temps le monde avance.

Pendant ce temps le soleil et les limpides galets de pluie

traversent les paysages,

survolent les plaines et les forêts profondes,

les montagnes et les rivières.

Pendant ce temps les oies sauvages, là-haut dans le pur air bleu,

sont sur le chemin du retour.

Qui que vous soyez, en quelque solitude,

le monde s’offre à votre imagination,

vous appelle comme les oies sauvages, rude et passionnant —

et indéfiniment signale votre place

dans la famille des choses.

                                       *

Wild Geese 

You do not have to be good. 
You do not have to walk on your knees 
for a hundred miles through the desert, repenting. 
You only have to let the soft animal of your body

 love what it loves. 
Tell me about despair, yours, and I will tell you mine. 
Meanwhile the world goes on. 
Meanwhile the sun and the clear pebbles of the rain 
are moving across the landscapes, 
over the prairies and the deep trees, 
the mountains and the rivers. 
Meanwhile the wild geese, high in the clean blue air, 
are heading home again. 
Whoever you are, no matter how lonely, 
the world offers itself to your imagination, 
calls to you like the wild geese, harsh and exciting —
over and over announcing your place 
in the family of things.

 

Mary Oliver, "Wild Geese", extrait de Dream Work, The Atlantic Monthly Press, 1986, p. 14. Traduction inédite de Chantal Tanet et Melissa Nickerson.

Texte à retrouver sur le blog Littératuredepartout

01/06/2012

Malentendu entre deux surréalistes, d'Erich Fried

 

 

(pour Katja Hajek)

 

« il pleut »

disait-elle

« des hommes en manteau noir

passent »

 

disait-elle

Mais Magritte

ne l’entendait

plus très bien

(puisqu’elle ne le dit que des années

après sa mort)

.

Il n’entendit donc pas

le dernier mot

et comprit seulement

« il pleut des hommes en manteau noir »

C’est cela qu’il a peint

 



(traduit de l'allemand par Chantal Tanet et Michael Hohmann)

D'autres poèmes du même auteur sur les sites http://droitdecites.org/2010/11/28/erich-fried-choix-de-p...http://terresdefemmes.blog s.com/mon_weblog/2010/12/erich-fried-das-richtige-wort.html
 http://lescarnetsdeucharis.hautetfort.com/

Tableau de Magritte Golconde (1953).

 

 

06/12/2011

L'automne du solitaire, de GeorgTrakl

 Pour Tristan Hordé


Eaux

 

L’automne sombre s’installe plein de fruits et d’abondance,

Éclat jauni des beaux jours d’été.

Un bleu pur sort d’une enveloppe flétrie ;

Le vol des oiseaux résonne de vieilles légendes.

Le vin est pressé, la douce quiétude

Emplie par la réponse ténue à des sombres questions.

 

Et, ici et là, une croix sur la colline désolée ;

Un troupeau se perd dans la forêt rousse.

Le nuage émigre au-dessus du miroir de l’étang ;

Le geste posé du paysan se repose.

Très doucement l’aile bleue du soir touche

Un toit de paille sèche, la terre noire.

 

Bientôt des étoiles nichent dans les sourcils de l’homme las ;

Dans les chambres glacées s’installe un décret silencieux

Et des anges sortent sans bruit des yeux bleus

Des amants, dont la souffrance se fait plus douce.

Le roseau murmure ; assaut d’une peur osseuse

Quand la rosée goutte, noire, des saules dépouillés.

 

Georg Trakl, Œuvres complètes, traduites de l’allemand par Marc Petit et Jean-Claude Schneider, Gallimard, 1972, p. 107.

 Photo de Chantal Tanet,  Tout droit réservé.


12/05/2011

Le blanc et les prénoms

 

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La couleur blanche étant le symbole de la pureté, il n'est pas étonnant que l'on retrouve beaucoup de prénoms dont l'origine étymologique renvoie à la couleur blanche:  

Origine germanique: blank (brillant, clair): Blanche, Bianca

Origine celtique: Gwenn (blanc, pur): Guenièvre, Jennifer, Gwenn, Gwennola, Gwennoline, Goulven, Goulwen, Gwenaël (le), Gwendaline, Gwendal, Gwendoline, Maïwenn.  

Origine latine 

Albus, alba (d'un blanc pur): Aube, Audeline, Alban, Albine, Albina, Alba.

Candidus, candida (d'un blanc éclatant) : Candide, Candida, Candy, Candie, candido  

A noter que Blandine est formée sur l'adjectif d'origine latine Blandus, qui signifie caressant et flatteur et n'a donc rien à voir avec le blanc!

 

(Référence Dictionnaire des prénoms de Chantal et Tristan Hordé, Larousse, Edition de 2009)

Photo d'ORLAN, Vierge Blanche au nuage de plastique Bulle, 1984, donation Camille, Coll. Centre Pompidou


17/02/2011

Nuit à Londres, d'Erich Fried

 

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Garder les mains

devant le visage

et laisser clos

les yeux                       

ne voir qu’un paysage

montagnes et torrent

et dans la prairie deux animaux

bruns sur le versant vert clair 

qui monte jusqu’à la forêt plus sombre

 

Et commencer à sentir

l’herbe fauchée

et tout en haut au-dessus des pins

en cercles lents un oiseau

petit et noir

sur le bleu du ciel

 

Et tout

absolument paisible

et si beau

que l’on sait

que cette vie vaut la peine

parce que l’on peut croire

que tout ça existe

 

 

 

Poèmes extraits du recueil Es ist was es ist (1983)

Traduits de l’allemand par Chantal Tanet et Michael Hohmann

On peut également trouver des traductions d'autres poèmes d'Erich Fried sur les sites  Les Carnets d'eucharis (le site de Nathalie Riera) et Droit de Cités

Tableau de Félix Valloton (1865 1935)