24/02/2013
Voix seule, (extraits), d'Alain Veinstein
Souvenirs 1. Enduit sur toile, chaux, encre. Dominique Hordé. Février 2013
Le ciel est déjà si noir :
il se confond avec la terre.
Pas assez de cœur
à ce moment précis
pour appeler terre
cette radiographie
des entrailles du temps.
Alain Veinstein, Voix seule, Seuil, 2011, p. 61
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23/02/2013
Décembre, de Paul Claudel
Balayant la contrée et ce vallon feuillu, ta main, gagnant les terres couleur de pourpre et de tan que tes yeux là-bas découvrent, s'arrête avec eux sur ce riche brocart. Tout est coi et enveloppé ; nul vert blessant, rien de jeune et rien de neuf ne forfait à la construction et au chant de ces tons pleins et sourds. Une sombre nuée occupe tout le ciel, dont, remplissant de vapeur les crans irréguliers de la montagne, on dirait qu'il s'attache à l'horizon comme par des mortaises. De la paume caresse ces larges ornements que brochent les touffes de pins noirs sur l'hyacinthe des plaines, des doigts vérifie ces détails enfoncés dans la trame et la brume de ce jour hivernal, un rang d'arbres, un village. L'heure est certainement arrêtée ; comme un théâtre vide qu'emplit la mélancolie, le paysage clos semble prêter attention à une voix si grêle que je ne la saurais ouïr.
Ces après-midi de décembre sont douces. Rien encore n'y parle du tourmentant avenir. Et le passé n'est pas si peu mort qu'il souffre que rien lui arrive. De tant d'herbe et d'une si grande moisson, nulle chose ne demeure que de la paille parsemée et une bourre flétrie ; une eau froide mortifie la terre retournée. Tout est fini. Entre une année et l'autre, c'est ici la pause et la suspension. La pensée, délivrée de son travail, se recueille dans une taciturne allégresse, et, méditant de nouvelles entreprises, elle goûte, comme la terre, son sabbat.
Paul Claudel, Connaissance de l'Est [1900, 1907 et 1960], préface de Jacques Petit, Poésie / Gallimard, 1974, p. 72
Tableau de John Constable (1778-1873). Huile sur toile. 24,4x39,1 cm . Metropolitain Museum of Art
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Charles Garnier et la couleur
En 1861, Charles Garnier qui rêve d'un Paris polychrome écrit:
« (…) je m’imagine le jour où (…) le voisin pourra construire sa maison sans se raccorder avec celle du voisin; les fonds des corniches reluiront de couleurs éternelles, les trumeaux seront enrichis de panneaux scintillants, et les frises dorées courront le long des édifices; les monuments seront revêtus de marbre et d’émaux, et les mosaïques feront aimer à tous et le mouvement et la couleur. Ce ne sera plus le luxe faux et mesquin, ce sera l’opulence, ce sera la sincérité. Les yeux, familiarisés avec toutes ces merveilles de nuances et d’éclat, auront exigé que nos costumes se modifient et se colorent à leur tour, et la ville entière aura comme un reflet harmonieux de soie et d’or… Mais hélas! je jette les regards autour de moi : je vois le ciel gris et sombre, je vois des maisons remises à neuf, je vois des ombres toutes noires qui s’agitent dans des boulevards interminables. Je vois enfin Paris tel qu’il est! et de mon rêve d’artiste je retombe dans la réalité bourgeoise. »
Opéra Garnier
http://www.latribunedelart.com/la-restauration-du-grand-foyer-de-l-opera-de-paris-article00624.html
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21/02/2013
William Morris et les Arts Décoratifs
C'est en 1861 que l'entreprise de décoration Morris, Marshall, Faulkner and Co, est créée , à Londres, et rebaptisée Morris & Co en 1875 quand William Morris en devient le seul propriétaire. Elle tente de retrouver l'esprit des temps médiévaux où« le plus grand artiste restait un artisan ; l'artisan le plus humble était aussi un artiste », écrit Morris. C'est sa grande idée : rehausser les arts décoratifs au niveau des arts dits majeurs, la peinture et la sculpture. Ainsi, pense-t-il, les ouvriers, devenus artisans d'art, libérés de l'esclavage des machines, retrouveront le plaisir de travailler de leurs mains à l'embellissement du monde.
La firme prospère rapidement car Morris se révèle être un génie de la composition : tirés de la nature, ses motifs de papiers peints et de tissus d'ameublement imprimés à la main surpassent en grâce tout ce que crachent les usines du royaume. On peut admirer l'extraordinaire travail de Morris & Co dans deux salles du Victoria and Albert Museum, à Londres : textile à motif de grive chapardeuse de fraises et tapisseries de Burne-Jones aux visages androgynes et rêveurs, chaise légère à l'assise de paille dessinée par Rossetti, carreaux de céramique... La collection se complète des réalisations de l'Arts and Crafts (art et artisanat), mouvement d'artistes-artisans émules de Morris. Il sera à l'origine de l'Art nouveau européen autour de 1900, puis du Bauhaus en Allemagne et du Mouvement moderne de Le Corbusier en France, ce que montre l'historienne Alexandra Midal dans son passionnant livre Design, Introduction à l'histoire d'une discipline.
Papiers peints de William Morrris
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Âme d'automne, de Georg Trakl
Dans du vert, profond fauche la faux
Bleu de l'air et jaune des gerbes
Envol de voix qui se moururent
Seule s'écoule une vieille eau.
Le soir le noir voyage passe
Sur les brunes collines d'automne
Salut d'argent du miroir d'un étang
Lance le vautour son cri clair et dur.
Âme d'automne (première version), Trakl, Poème 1, traduction Jacques Legrand, Flammarion, p 257
Lesser Ury, 34,9 × 49,5 cm (1900)
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17/02/2013
La jeune fille, de Francis Jammes
La jeune fille est blanche,
elle a des veines vertes
aux poignets, dans ses manches
ouvertes.
On ne sait pas pourquoi
elle rit. Par moment
elle crie et cela
est perçant.
Est-ce qu’elle se doute
qu’elle vous prend le cœur
en cueillant sur la route
des fleurs ?
On dirait quelquefois
qu’elle comprend des choses.
Pas toujours. Elle cause
tout bas.
« Oh ! ma chère ! oh ! là là...
... Figure-toi... mardi
je l’ai vu... j’ai rri. » — Elle dit
comme ça.
Quand un jeune homme souffre,
d’abord elle se tait :
et ne rit plus, tout
étonnée.
Dans les petits chemins
elle remplit ses mains
de piquants de bruyères,
de fougères.
Elle est grande, elle est blanche,
elle a des bras très doux.
Elle est très droite et penche
le cou.
De l’Angélus de l’aube à l’Angélus du soir (1898). Poésies Gallimard
Tableau d'Ilya Zomb. http://www.zombart.com/
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15/02/2013
Hiéroglyphe, de Charles Cros
Marc Léonard. Idaho. Acrylique/bois. 60x73 cm A retrouver sur ses sites, là et là
J’ai trois fenêtres à ma chambre :
L’amour, la mer, la mort,
Sang vif, vert calme, violet.
Ô femme, doux et lourd trésor !
Froids vitraux, odeurs d’ambre.
La mer, la mort, l’amour,
Ne sentir que ce qui me plaît…
Femme, plus claire que le jour !
Par ce soir doré de septembre,
La mort, l’amour, la mer,
Me noyer dans l’oubli complet.
Femme! femme! cercueil de chair !
Charles Cros, Recueil Le collier de griffes, p 316, Rimbaud, Cros, Corbières,
Lautréamont, Collection Bouquins
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12/02/2013
Le rouge et le vert (Le café la nuit), de Vincent Van Gogh
Le café la nuit, huile sur toile, 70x89, Yale University Art Gallery
"J’ai essayé d’exprimer les terribles passions de l’humanité au moyen du rouge et du vert."
"Dans mon tableau Le Café la nuit, j’ai cherché à exprimer l’idée que le café est un endroit où l’on peut se ruiner, devenir fou, commettre des crimes. Alors j’ai cherché, par des contrastes de rose tendre et de rouge sang, de doux vert Louis XV et Véronèse, contrastant avec les jaune et les vert-bleu durs, tout cela dans une atmosphère de fournaise infernale, de soufre pâle, à exprimer comme la puissance des ténèbres d’un assommoir.
Et en même temps, avec un apparence de gaieté japonaise et la bonhomie du Tartarin…"
Lettre de Vincent Van Gogh à Théo Van Gogh, du 8 et 9 septembre 1888
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10/02/2013
Jardins, (Connaissance de l'est) , de Paul Claudel
Lotus Peak, de Liu Haisu Source
Il est trois heures et demie. Deuil blanc : le ciel est comme offusqué d’un linge. L’air est humide et cru.
J’entre dans la cité. Je cherche les jardins.
Je marche dans un jus noir. Le long de la tranchée dont je suis le bord croulant, l’odeur est si forte qu’elle est comme explosive. Cela sent l’huile, l’ail, la graisse, la crasse, l’opium, l’urine, l’excrément et la tripaille. Chaussés d’épais cothurnes ou de sandales de paille, coiffés du long capuce du foumaoou de la calotte de feutre, emmanchés de caleçons et de jambières de toile ou de soie, je marche au milieu de gens à l’air hilare et naïf.
Le mur serpente et ondule, et sa crête, avec son arrangement de briques et de tuiles à jour, imite le dos et le corps d’un dragon qui rampe ; une façon, dans un flot de fumée qui boucle, de tête le termine. — C’est ici. Je heurte mystérieusement à une petite porte noire : on ouvre. Sous des toits surplombants, je traverse une suite de vestibules et d’étroits corridors. Me voici dans le lieu étrange.
C’est un jardin de pierres. — Comme les anciens dessinateurs italiens et français, les Chinois ont compris qu’un jardin, du fait de sa clôture, devait se suffire à lui-même, se composer dans toutes ses parties. Ainsi la nature s’accommode singulièrement à notre esprit, et, par un accord subtil, le maître se sent, où qu’il porte son œil, chez lui. De même qu’un paysage n’est pas constitué par de l’herbe et par la couleur des feuillages, mais par l’accord de ses lignes et le mouvement de ses terrains, les Chinois construisent leurs jardins à la lettre, avec des pierres. Ils sculptent au lieu de peindre. Susceptible d’élévations et de profondeurs, de contours et de reliefs, par la variété de ses plans et de ses aspects, la pierre leur a semblé plus docile et plus propre que le végétal, réduit à son rôle naturel de décoration et d’ornement, à créer le site humain. La nature elle-même a préparé les matériaux, suivant que la main du temps, la gelée, la pluie, use, travaille la roche, la fore, l’entaille, la fouille d’un doigt profond. Visages, animaux, ossatures, mains, conques, torses sans tête, pétrifications comme d’un morceau de foule figée, mélangée de feuillages et de poissons, l’art chinois se saisit de ces objets étranges, les imite, les dispose avec une subtile industrie.
Le lieu ici représente un mont fendu par un précipice et auquel des rampes abruptes donnent accès. Son pied baigne dans un petit lac que recouvre à demi une peau verte et dont un pont en zigzag complète le cadre biais. Assise sur des pilotis de granit rose, la maison-de-thé mire dans le vert-noir du bassin ses doubles toits triomphaux, qui, comme des ailes qui se déploient, paraissent la lever de terre. Là-bas, fichés tout droit dans le sol comme des chandeliers de fer, des arbres dépouillés barrent le ciel, dominent le jardin de leurs statures géantes. Je m’engage parmi les pierres, et par un long labyrinthe dont les lacets et les retours, les montées et les évasions, amplifient, multiplient la scène, imitent autour du lac et de la montagne la circulation de la rêverie, j’atteins le kiosque du sommet. Le jardin paraît creux au-dessous de moi comme une vallée, plein de temples et de pavillons, et au milieu des arbres apparaît le poème des toits.
Il en est de hauts et de bas, de simples et de multiples, d’allongés comme des frontons, de turgides comme des sonnettes. Ils sont surmontés de frises historiées, décorés de scolopendres et de poissons : la cime arbore à l’intersection ultime de ses arêtes, — cerf, cigogne, autel, vase ou grenade ailée, — emblème. Les toitures dont les coins remontent, comme des bras on relève une robe trop ample, ont des blancheurs grasses de craie, de noirs de suie jaunâtres et mats. L’air est vert, comme lorsqu’on regarde au travers d’une vieille vitre.
L’autre versant nous met face au grand Pavillon, et la descente qui lentement me ramène vers le lac par des marches irrégulières gradue d’autres surprises. À l’issue d’un couloir, je vois les cinq ou six cornes du toit dont le corps m’est dérobé pointer en désordre contre le ciel. Rien ne peint le jet ivre de ces proues fées, la fière élégance de ces pédoncules fleuris qui dirigent obliquement vers la nue chagrine un lys. Pourvue de cette fleur, la forte membrure se relève comme une branche qu’on lâche.
J’ai atteint le bord de l’étang, dont les tiges des lotus morts traversent l’eau immobile. Le silence est profond comme dans un carrefour de forêt l’hiver.
Ce lieu harmonieux fut construit pour le plaisir des membres du « Syndicat du commerce des haricots et du riz », qui, sans doute, par les nuits de printemps, y viennent boire le thé en regardant briller le bord inférieur de la lune.
L’autre jardin est plus singulier.
Il faisait presque nuit, quand, pénétrant dans l’enclos carré, je le vis jusqu’à ses murs rempli par un vaste paysage. Qu’on se figure un charriement de rochers, un chaos, une mêlée de blocs culbutés, entassés là par une mer en débâcle, une vue sur une région de colère, campagne blême telle qu’une cervelle divisée de fissures entre-croisées. Les Chinois font des écorchés de paysages. Inexplicable comme la nature, ce petit coin paraissait vaste et complexe comme elle. Du milieu de ces rocailles s’élevait un pin noir et tors ; la minceur de sa tige, la couleur de ses houppes hérissées, la violente dislocation de ses axes, la disproportion de cet arbre unique avec le pays fictif qu’il domine, — tel qu’un dragon qui, fusant de la terre comme une fumée, se bat dans le vent et la nuée, — mettaient ce lieu hors de tout, le constituaient grotesque et fantastique. Des feuillages funéraires, çà et là, ifs, thuyas, de leurs noirs vigoureux, animaient ce bouleversement. Saisi d’étonnement, je considérais ce document de mélancolie. Et du milieu de l’enclos, comme un monstre, un grand rocher se dressait dans la basse ombre du crépuscule comme un thème de rêverie et d’énigme.
Extrait de Connaissance de l'est, de Paul Claudel. Collection Poésies, Gallimard
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09/02/2013
Nocturne, de Cesare Pavese
Lesser Ury 1861, 1931 Collection privée, Pastel 34,1 x 47,2 cm
La colline est nocturne, dans le ciel transparent.
Ta tête s'y enchâsse, elle se meut à peine,
compagne de ce ciel. Tu es comme un nuage
entrevu dans les branches. Dans tes yeux rit
l'étrangeté d'un ciel qui ne t'appartient pas.
La colline de terre et de feuillage enferme
de sa masse noire ton vivant regard,
ta bouche a le pli d'une cavité douce au milieu
des collines lointaines. Tu as l'air de jouer
à la grande colline et à la clarté du ciel :
pour me plaire tu répètes le paysage ancien
et tu le rends plus pur.
Mais ta vie est ailleurs.
Ton tendre sang s'est formé ailleurs.
Les mots que tu dis ne trouvent pas d'écho
dans l'âpre tristesse de ce ciel.
Tu n'es rien qu'un nuage très doux, blanc
qui s'est pris une nuit dans les branches anciennes.
Cesare Pavese, Travailler fatigue [Lavorare stanca],
traduction de l'italien et préfacé par Gilles de Van,
Poésie du Monde entier, Gallimard, 1969, p. 85 et 84.
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02/02/2013
Cet être devant soi (extrait 2), de Claude Chambard
Dessin à la plume d'Henri Michaux
Le crayon est le chemin par lequel je peux parcourir le monde. Il me faut y arriver vivant. Ce n’est pas une mince affaire. J’ai toujours pensé que, dans le livre, le monde ne pouvait être vu qu’à hauteur d’enfance. L’écriture commence & prend fin dans une classe de cours préparatoire, pour toute la vie & pour tous les livres, dans toutes les bibliothèques. De même la lecture. Manipulations, transgressions, interprétations, variations —— archaïques. Encre violette & papier réglé à grandes marges, encrier en porcelaine, plumes Sergent-Major, buvards publicitaires… Apprendre à dessiner — les caractères — apprendre à dessiner — les traits portraits &c. — lisibilité, blanc, équilibre, approche, chasse, ce qu’on ne voit pas permet ce que l’on perçoit — comme on oublie la ponctuation lorsqu’elle est juste, lorsqu’elle va de soi la lecture va de soi — l’écriture jamais. Ton corps est dans le livre, personne ne le voit, même pas moi, mais je le reconnais, aussi les oiseaux dans le ciel & le corps des écrivains dans leur écriture.
pour Pascal Quignard
Claude Chambard, extrait de Cet être devant soi , Æncrages & cie, 2012.
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01/02/2013
Cet être devant soi (extrait), de Claude Chambard
Nakamura Hôchû, The Korin Album, 1802 Source
Un chant d’hiver :
les oiseaux au sol picorent les graines tombées de ta main
je me gave de la couleur du ciel
j’ai piétiné la cage
& caressé la hulotte qui niche dans le chêne troué
le rouge-gorge est revenu — toujours
La lumière est si blanche ce matin que tu ne peux te lever
qu’est-ce qu’un souvenir m’as tu demandé
noir sur blanc
une prière qui tinte éternellement t’ai-je dit
moi qui ne suis sûr de rien
qui ne sais rien de rien juste que nulle part
est le lieu où nous nous tenons serrés
avec nos blessures nos signes de ponctuation
nos conjonctions de coordination
devant —— devant
tout commence
Claude Chambard, extrait de Cet être devant soi , Æncrages & cie, 2012.
14:18 Publié dans Blanc, Noir | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : claude chambard, cet être devant soi, nakamura hôchû, blanc, noir, couleur | Facebook | Imprimer | | |