02/06/2011
L'escale portugaise, de Jules Supervielle
L'escale fait sécher ses blancheurs aux terrasses
où le vent s'évertue
Les maisons roses eu soleil qui les enlace
Sentent l'algue et la rue.
Les femmes de la mer, des paniers de poissons
Irisés sur la tête,
Exposent au soleil bruyant de la saison
La sous-marine fête.
Le feuillage strident a débordé le vert
Sous la crue de la lumière
Les roses printanières
Ont fait irruption par les grilles de fer.
Le plaisir matinal des boutiques ouvertes
Au maritime été
Et des fenêtres vertes
Qui se livrent au ciel, les volets écartés.
S'écoule vers la Place où stagnent les passants
Jusqu'à ce que soit ronde
L'ombre des orangers qui simule un cadran
Où le doux midi grogne.
Extrait de Gravitations
Tableau de Nicolas de Stael
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30/05/2011
Horizon du sol (extrait), d'Etienne Faure
Le soir dans la rue aux cent pas
où déambulent des bassins qui donnèrent la vie,
l’écho du mur d’en face avertit parfois
du brouhaha d’un bar qu’on traverse
soudain frappé du halo bleu ou rouge
des néants révélés, le temps d’entrevoir
l’intention dolosive, les hésitations
marquées par des regards en fuite, dos hostiles,
un recoin de bouche effilée, la menace
martelée du poing sur le zinc, nom de dieu
— comme s’il y était pour quelque chose —
du meurtre préfiguré dans le carmin des trognes
— ça va cogner — et contre les prédateurs
du spectacle un avertissement de couleur semblable
— ma photo, mon poing sur la gueule —
quand plus haut s’ouvrent les fenêtres noires,
s’encadrent dans le chambranle, portraits de nuit,
les fumeurs et les adolescents qui sécrètent
des propos à mi-voix, secrets sans fil,
juste en deçà des arroseurs de forêts primitives
cachés dans le vert jaunissant.
Extrait d' Horizon du sol, Champ Vallon, 2011, p. 26.
Tableau de Roberto Crippa (1921 1972)
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26/05/2011
Spleen, de Paul Verlaine
Les roses étaient toutes rouges,
Et les lierres étaient tout noirs.
Chère, pour peu que tu te bouges,
Renaissent tous mes désespoirs.
Le ciel était trop bleu, trop tendre
La mer trop verte et l’air trop doux.
Je crains toujours,- ce qu’est d’attendre!
Quelque fuite atroce de vous.
Du houx à la feuille vernie
Et du luisant buis je suis las,
Et de la campagne infinie
Et de tout, fors de vous, hélas!
Aquarelles, Romances sans paroles
Tableau Egon Schiele
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21/05/2011
Histoire de bleu, (extrait) de Jean-Michel Maulpoix
Le bleu ne fait pas de bruit.
C'est une couleur timide, sans arrière-pensée, présage, ni projet, qui ne se jette pas brusquement sur le regard comme le jaune ou le rouge, mais qui l'attire à soi, l'apprivoise peu à peu, le laisse venir sans le presser, de sorte qu'en elle il s'enfonce et se noie sans se rendre compte de rien.
Le bleu est une couleur propice à la disparition.
Une couleur où mourir, une couleur qui délivre, la couleur même de l'âme après qu'elle s'est déshabillée du corps, après qu'a giclé tout le sang et que se sont vidées les viscères, les poches de toutes sortes, déménageant une fois pour toutes le mobilier de ses pensées.
Indéfiniment, le bleu s'évade.
Ce n'est pas, à vrai dire, une couleur. Plutôt une tonalité, un climat, une résonance spéciale de l'air. Un empilement de clarté, une teinte qui naît du vide ajouté au vide, aussi changeante et transparente dans la tête de l'homme que dans les cieux.
L'air que nous respirons, l'apparence de vide sur laquelle remuent nos figures, l'espace que nous traversons n'est rien d'autre que ce bleu terrestre, invisible tant il est proche et fait corps avec nous, habillant nos gestes et nos voix. Présent jusque dans la chambre, tous volets tirés et toutes lampes éteintes, insensible vêtement de notre vie.
Histoire de bleu, collection poésie Gallimard
Tableau d'Elisabeth Couloignier que je remercie. Vous pouvez retrouver son travail:
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18/05/2011
Les réparties de Nina, d'Arthur Rimbaud
LUI - Ta poitrine sur ma poitrine,
Hein ? nous irions,
Ayant de l'air plein la narine,
Aux frais rayons
Du bon matin bleu, qui vous baigne
Du vin de jour ?...
Quand tout le bois frissonnant saigne
Muet d'amour
De chaque branche, gouttes vertes,
Des bourgeons clairs,
On sent dans les choses ouvertes
Frémir des chairs :
Tu plongerais dans la luzerne
Ton blanc peignoir,
Rosant à l'air ce bleu qui cerne
Ton grand oeil noir,
Amoureuse de la campagne,
Semant partout,
Comme une mousse de champagne,
Ton rire fou :
Riant à moi, brutal d'ivresse,
Qui te prendrais
Comme cela, - la belle tresse,
Oh ! - qui boirais
Ton goût de framboise et de fraise,
O chair de fleur !
Riant au vent vif qui te baise
Comme un voleur ;
Au rose, églantier qui t'embête
Aimablement :
Riant surtout, ô folle tête,
À ton amant !....
........................................................
- Ta poitrine sur ma poitrine,
Mêlant nos voix,
Lents, nous gagnerions la ravine,
Puis les grands bois !...
Puis, comme une petite morte,
Le coeur pâmé,
Tu me dirais que je te porte,
L'oeil mi-fermé...
Je te porterais, palpitante,
Dans le sentier :
L'oiseau filerait son andante
Au Noisetier...
Je te parlerais dans ta bouche..
J'irais, pressant
Ton corps, comme une enfant qu'on couche,
Ivre du sang
Qui coule, bleu, sous ta peau blanche
Aux tons rosés :
Et te parlant la langue franche - .....
Tiens !... - que tu sais...
Nos grands bois sentiraient la sève,
Et le soleil
Sablerait d'or fin leur grand rêve
Vert et vermeil
........................................................
Le soir ?... Nous reprendrons la route
Blanche qui court
Flânant, comme un troupeau qui broute,
Tout à l'entour
Les bons vergers à l'herbe bleue,
Aux pommiers tors !
Comme on les sent tout une lieue
Leurs parfums forts !
Nous regagnerons le village
Au ciel mi-noir ;
Et ça sentira le laitage
Dans l'air du soir ;
Ca sentira l'étable, pleine
De fumiers chauds,
Pleine d'un lent rythme d'haleine,
Et de grands dos
Blanchissant sous quelque lumière ;
Et, tout là-bas,
Une vache fientera, fière,
À chaque pas...
- Les lunettes de la grand-mère
Et son nez long
Dans son missel ; le pot de bière
Cerclé de plomb,
Moussant entre les larges pipes
Qui, crânement,
Fument : les effroyables lippes
Qui, tout fumant,
Happent le jambon aux fourchettes
Tant, tant et plus :
Le feu qui claire les couchettes
Et les bahuts :
Les fesses luisantes et grasses
Du gros enfant
Qui fourre, à genoux, dans les tasses,
Son museau blanc
Frôlé par un mufle qui gronde
D'un ton gentil,
Et pourlèche la face ronde
Du cher petit.....
Que de choses verrons-nous, chère,
Dans ces taudis,
Quand la flamme illumine, claire,
Les carreaux gris !...
- Puis, petite et toute nichée,
Dans les lilas
Noirs et frais : la vitre cachée,
Qui rit là-bas....
Tu viendras, tu viendras, je t'aime !
Ce sera beau.
Tu viendras, n'est-ce pas, et même...
Elle - Et mon bureau ?
9ème poème du cahier de Douai écrit alors qu'il n'a pas encore 16 ans
Tableau de Pierre Bonnard (Prairie, peint dans les années 30
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15/05/2011
Orient, de Nizar Kabbani
Brisées les jarres
Les jarres de couleurs
Notre rendez-vous
Est dans les nuages
Sous les fenêtres de l'Orient.
Notre voyage
Dans les ports de turquoise
Et sur les stores bleus
De l'Occident.
Avec les parfums
Notre couche voyage
Rose
Changeante aux horizons.
Nourrissons-nous
Aux surplis de la rose
A tout ce que la nuit recèle
De rythmes et d'amour.
Extrait du Poème Orient, Anthologie de la littérature arabe contemporaine, éditions du seuil, p150
Tableau de Matisse (L'escargot, 1952)
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13/05/2011
Le vert en seconde vie, de Dominique Sorrente
Épuisé de sa journée, le vert
fait grimace
tout au fond des carrières arides.
Il se rappelle la joue de la forêt,
comment bourdonnent les elfes en rangs serrés
qui ont le baiser facile,
la prière d’âge nu sur les mousses
et son nectar.
La vie va vite derrière le verger,
sur le carré d’herbe où l’on essuie déjà les traces
des rendez-vous, à bruits de tôles et de marteaux - piqueurs,
vite sur l’accoudoir blême où s’appuient les morts
qui ont troqué leur tapis volants
contre des urnes.
En ville, on parlemente avec
la feuille qui sait qu’elle n’attrapera jamais le ciel.
Un lierre rebelle se met à invectiver le jardinier
devenu pesticide.
Mais le vert ne trouve aucune raison
pour que le monde passe son tour.
Il attend obstinément de naître,
de naître encore,
et qu’on apprenne à épeler son nom
en broutant dans un feu d’herbe rare.
Texte inédit (Merci à Dominique Sorrente de me confier ce texte). On peut retrouver Dominique Sorrente sur son blog http://www.scriptorium-marseille.fr
Dessin de Federico García Lorca
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10/05/2011
Chapitre XV, l'ombre, (extrait des Ombres errantes) de Pascal Quignard
(A propos du texte que JunichiroTanizaki publia en 1933 où il disait qu'il regrettait l'ombre)
Il aimait la pénombre que développe le thé dans son monde chaud et liquide.
Et les couleurs que la petite feuille roulée déploie en filament dans l'eau avant de s'y mêler.
Et le déchet rougeâtre et à certains égard automnal qui vient peu à peu gésir au fond du bol de porcelaine.
xx
Il aimait l'affût lié aux ténébres et à l'immensité flottante qu'elles ajoutent.
Il aimait les vêtements aux belles couleurs sombres dans les marrons ou les gris.
Les Ombres errantes, édition Grasset, p 47 et 48
Tableau de zao wou ki
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09/05/2011
Le ruisseau de Jacques Prévert
Beaucoup d’eau a passé sous le pont
et aussi énormément de sang
Mais aux pieds de l’amour
coule un grand ruisseau blanc
Et dans les jardins de la lune
où tous les jours c’est ta fête
ce ruisseau chante en dormant
Et cette lune c’est ma tête
où tourne un grand soleil bleu
Et ce soleil c’est tes yeux
Extrait de Histoires
Tableau de John Atkinson Grimshaw (6 septembre 1836 – 13 octobre 1893)
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03/05/2011
Les erreurs, de Jean Tardieu
(La première voix est posée, polie, maniérée et prétentieuse; l’autre est rauque, méchante et dure.)
Je suis ravi de vous voir
bel enfant vêtu de noir.
- Je ne suis pas un enfant
je suis un gros éléphant.
Quelle est cette femme exquise
qui savoure des cerises ?
- C’est un marchand de charbon
qui s’achète du savon.
Ah! que j’aime entendre à l’aube
roucouler cette colombe !
- C’est un ivrogne qui boit
dans sa chambre sous le toit.
Mets ta main dans ma main tendre
je t’aime ô ma fiancée!
- Je n’suis point vot’ fiancée
je suis vieille et j’suis pressée
laissez-moi passer !
Jean Tardieu ("Monsieur monsieur" Gallimard 1951)
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28/04/2011
La maison près de la mer II (extrait), de Lorand Gaspar
a
genêts, oxalis,acacias,
vers quoi creusent en nous
ces jaunes si vivaces?
se laisser de part en part
de l'infime à l'inconnaissable
traverser de ces ors d'odorantes icônes
pensée arrête-toi et accueille
cet instant de fraîcheur
que ton corps compose avec la terre __
Patmos et autres poèmes, Poésie Gallimard, P113
Tryptique de Zao Wou Ki
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27/04/2011
Vestige d'une vieille haie de jardin, de Reiner Kunze
Aubépine et rouge-épine
branches entremêlées
Rameaux d’écume
rouge dans le blanc
blanc dans le rouge
Bois fleurissant
à la vie à la mort
Reiner Kunze, Nuit des tilleuls, (Lindennacht, édition bilingue),traduction de Mireille Gansel & Gwenn Darras, Calligrammes/Bernard Guillemot, 2009, pp. 107 et 75 à la vie à la mort
Tableau de Rothko
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25/04/2011
Plutôt la vie, d'André Breton
Plutôt que cette heure toujours couverte que ces terribles voitures de flammes froides
Que ces pierres blettes
Plutôt ce cœur à cran d’arrêt
Que cette mare aux murmures
Et que cette étoffe blanche qui chante à la fois dans l’air et dans la terre
Que cette bénédiction nuptiale qui joint mon front à celui de la vanité totale
Plutôt la vie
Plutôt la vie que ces prismes sans épaisseur même si les couleurs sont plus pures
Plutôt la vie avec ses draps conjuratoires
Ses cicatrices d’évasions
Plutôt la vie plutôt cette rosace sur ma tombe
La vie de la présence rien que de la présence
Où une voix dit Es-tu là où une autre réponde Es-tu là
Je n’y suis guère hélas
Et pourtant quand nous ferions le jeu de ce que nous faisons mourir
Plutôt la vie
Plutôt la vie plutôt la vie Enfance vénérable
Le ruban qui part d’un fakir
Ressemble à la glissière du monde
Le soleil a beau n’être qu’une épave
Pour peu que le corps de la femme lui ressemble
Tu songes en contemplant la trajectoire tout du long
Ou seulement en fermant les yeux sur l’orage adorable qui a nom ta main
Plutôt la vie
[...]
André Breton, Clair de Terre, Poésie/Gallimard n° 11, 1966, p. 72
Tableau de Jakson Pollock.
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22/04/2011
En vert et noir, de Jean Tortel
Pré ciel
Vert bleu
Pluriel vers le noir
Précieux certes mais quelle autre
Couleur cristallisera l’ombre
Jean Tortel, En vert et noir,
Lithographie de Michel Duport, La Sétérée, 1989
Colloque 2011 à Montpellier: relire Jean Tortel https://recherchedit.univ-montp3.fr/rirra21/images/storie...
18:58 Publié dans Art et poésie en couleurs, Poésie et couleurs | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : en vert et noir, jean tortel, vert, noir, michel duport | Facebook |
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Mystique, (extrait), Joë Bousquet
La pensée est de pure lumière, comme le rêve ; mais elle s’épuise à nous animer.
Vie à recommencer sur les inébranlables assises de ce dont on ne peut douter. L’image doit brûler la parole.
La plus grande découverte poétique a été annoncée par Rimbaud. Il a compris que les images n’étaient pas intérieures à la pensée, mais qu’elles étaient attachées aux mots et filles de leur sonorité.
La pensée est fille de l’homme, la poésie est fille de l’esprit.
La rime éveille la vision, parle à la rêverie.
La poésie fait du voir avec de l’entendre.
Joë Bousquet, Mystique, Éditions Gallimard, 1973
Tableau de Janda Zdenek
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13/04/2011
Lou ma rose, de Guillaume Apollinaire
Ton derrière merveilleux n'est-ce pas la plus belle rose
Tes seins tes seins chéris ne sont-ce pas des roses
Et les roses ne sont-ce pas de jolis petits Lous
Que l'on fouette comme la brise
Fustige les fesses des roses dans le jardin
Abandonné
Lou ma rose ou plutôt mes roses
Tu m'as envoyé des feuilles de rose
Ô petite déesse
Tu crées les roses
Et tu fais les feuilles de roses
Roses
Petites femmes à poil qui se baladent
Gentiment
Elles se baladent en robe de satin
Sur des escarpolettes
Elles chantent le plus beau parfum le plus fort le plus doux
Lou ma rose ô ma perfection je t'aime
Et c'est avec joie que je risque de me piquer
En faveur de ta beauté
Je t'aime je t'adore je mordille tes feuilles de rose
Rose reine des fleurs Lou reine des femmes
Je te porte au bout de mes doigts ô Lou ô rose
Au bout de mes doigts en te faisant menotte
Jusqu'à ce que tu t'évanouisses
Comme s'évanouit le parfum
Des roses
Je t'embrasse ô Lou et je t'adore
Poèmes à Lou
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11/04/2011
Eclaircie en hiver, de Francis Ponge
Le bleu renaît du gris, comme la pulpe éjectée d’un raisin noir.
Toute l’atmosphère est comme un œil trop humide, où raisons et envie de pleuvoir ont momentanément disparu.
Mais l’averse a laissé partout des souvenirs qui servent au beau temps de miroirs.Il y a quelque chose d’attendrissant dans cette liaison entre deux états d’humeur différente. Quelque chose de désarmant dans cet épanchement terminé.
Chaque flaque est alors comme une aile de papillon placée sous vitre,
Mais il suffira d’une roue de passage pour en faire jaillir la boue.
Francis Ponge, Pièces, dans Œuvres complètes, I, Gallimard, La Pléiade, p. 720-721.
Tableau de Nicolas de Stael
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09/04/2011
A celle qui s'amuse, de Pierre-Jean Jouve
Inguérissable amour ! Inguérissable plaie
Inguérissable rouge feuilles dans du noir
Ou du blond mais toujours du sombre
Inguérissables maigres démons nus
Vous luisez en vous tordant contre les ombres
Inapaisées inguérissables trous sanglants.
Tu voles pourtant un sourire enragé
Tes yeux se promènent comme deux pierres
Ta chevelure est un jeu de frisons sur la tombe
Ton masque est mort pour mieux regarder
Pour mieux regarder des feux d’entrailles.
La déraison cherchant à devenir raison
Inscrit un numéro sur la tenture.
Pierre Jean Jouve, Sueur de sang, dans Œuvre I, édition établie par Jean Starobinski, Mercure de France, 1987, p. 253.
Tableau de Jerome-Martin Langlois (1779 - 1838)
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03/04/2011
L'étoile a pleuré rose, d'Arthur Rimbaud (1871)
L'étoile a pleuré rose au coeur de tes oreilles,
L'infini roulé blanc de ta nuque à tes reins ;
La mer a perlé rousse à tes mammes vermeilles
Et l'Homme saigné noir à ton flanc souverain.
Tableau de Paul Bouchard
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Par une nuit nouvelle, de Paul Eluard
Femme avec laquelle j’ai vécu
Femme avec laquelle je vis
Femme avec laquelle je vivrai
Toujours la même
Il te faut un manteau rouge
Des gants rouges un masque rouge
Et des bas noirs
Des raisons des preuves
De te voir toute nue
Nudité pure ô parure parée
Seins ô mon coeur
Recueil La vie immédiate, 1932
Tableau de Gustave Courbet
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