08/10/2010
Aube d'octobre, de Philippe Jaccottet
Il fait un peu plus froid.
Le rouge-queue chante dans l'aube qui se dissipe.
C'est comme si chantait un charbon.
En plein midi, soudain, deux martinets très haut dans le ciel à côté d'un nuage en forme de tour blanche, légère — comme je ne sais quelle apparition foudroyante, énigmatique, ou quelle mesure de la hauteur de l'air, quelle révélation de l'espace aérien, quelle flèche de fer dans le cœur. Une joie bizarre, d'à peine une seconde — et en me relisant, je me rappelle le gerfaut des Solitudes, « scandale bizarre de l'air » —, une lettre tracée sur le bleu puis effacée, un trait — ou le crochet d'un hameçon ? Sait-on qui a pu vous ferrer ainsi ?
La fauvette dans le tilleul : chant extraordinairement, mystérieusement clair, comme s'il traversait, transperçait une enveloppe, franchissait une limite.
Fauvette
dernier oiseau parleur en plein été
de quoi me parles-tu ainsi de loin en loin
dans le feuillage du tilleul ?
De quoi peut donc parler voix si limpide ?
Philippe Jaccottet, Autres journées, Fata Morgana, 1987,
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Adieu, de Pierre-Jean Jouve
I
Noir. Noir. Sentiment noir.
Frappe image noire un coup retentissant sur le gong du lointain
Pour l'entrée à l'épaisseur bien obscure de ce coeur
L'épaisse cérémonie à la longue plaine noire
De l'intérieur et de l'adieu, de minuit et du départ!
Frappe, comme un gong noir à la porte d'enfer!
Un aigre vent soulève les roseaux des sables
Confond les monts
Sous les nuées de mauvais temps de la mémoire
Fait retomber la vague en éclatante blancheur dans le néant.
C'est la journée épaisse intime où Elle part
Jetant un dernier oeil aux prouesses d'amant,
Où il quitte, quelques maigres longueurs encor de faible sable
Et poussant la vieillesse de l'âge un aigre vent.
Noir, noir, sentiment noir, oh frappe clair et noir
Pour l'épaisse cérémonie à la terre sans lendemain
Portant comme un socle divin le monument de leur départ.
II
De longues lignes de tristesse et de brouillard
Ouvrent de tous côtés cette plaine sans fin
Où les monts s'évaporent puis reprennent
A des hauteurs que ne touche plus le regard:
Là où nous sommes arrivés, donne ta main,
Puis aux saules plus écroulés que nos silences
A l'herbe de l'été que détruisent tes pieds
Dis un mot sans raison profère un vrai poème,
Laisse que je caresse enfin tes cheveux morts
Car la mort vient roulant pour nous ses tambours loin,
Laisse que je retouche entièrement ton corps
Dans son vallon ou plage extrême fleur du temps
Que je plie un genou devant ta brune erreur
Ta beauté ton parfum défunt près du départ
Adorant ton défaut ton vice et ton caprice
Adorant ton abîme noir sans firmament.
Laisse ô déjà perdue, et que je te bénisse
Pour tous les maux par où tu m'as appris l'amour
Par tous les mots en quoi tu m'as appris le chant.
III
Adieu. La nuit déjà nous fait méconnaissables
Ton visage est fondu dans l'absence. Oh adieu
Détache ta main de ma main et tes doigts de mes doigts arrache
Laissant tomber entre nos espaces le temps
Solitaire étranger le temps rempli d'espaces;
Et quand l'obscur aura totalement rongé
La forme de ton ombre ainsi qu'une Eurydice
Retourne-toi afin de consommer ta mort
Pour me communiquer l'adieu. Adieu ma grâce
Au point qu'il n'est espoir de relier nos sorts
Si même s'ouvre en nous le temple de la grâce.
Tableau (huile) d'Atkinson Grimshaw
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05/10/2010
Newton et les couleurs
Pour celles et ceux qui s'intéressent aux aspects scientifiques des couleurs, et en particulier aux travaux de Newton, un article à consulter sur :
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04/10/2010
La complainte du petit cheval blanc, de Paul Fort
Le petit cheval dans le mauvais temps,
qu'il avait donc du courage !
C'était un petit cheval blanc,
tous derrière et lui devant.
Il n'y avait jamais de beau temps
dans ce pauvre paysage.
Il n'y avait jamais de printemps,
ni derrière ni devant.
Mais toujours il était content,
menant les gars du village,
à travers la pluie noire des champs,
tous derrière et lui devant.
Sa voiture allait poursuivant
sa belle petite queue sauvage.
C'est alors qu'il était content,
eux derrière et lui devant.
Mais un jour, dans le mauvais temps,
un jour qu'il était si sage,
il est mort par un éclair blanc,
tous derrière et lui devant.
Il est mort sans voir le beau temps,
qu'il avait donc du courage !
Il est mort sans voir le printemps
ni derrière ni devant.
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02/10/2010
Depuis tant d'années...de Lorand Gaspar
Depuis tant d'années je lave mon regard
dans une fenêtre où ciel et mer
depuis toujours sont sans s'interrompre
où leurs vies sont un, sont innombrables
sont une fois encore dans mon âme
un champ magnétique d'épousailles
une goutte de lumière-oiseau.
Depuis tant d'années je lave mon regard
à la première couleur si fraîche
sur les lèvres humides de nuit
d'être la peau et d'être la pierre
où mes doigts rencontrent le secret,
ce savoir qu'ils sont et celui qui est
des tonnes infinies de lumière.
Du plus pâle au tranchant du plus sombre
sans s'interrompre entre sang et pensée
entre feuille pinceau étendue
corps de liquide musique à jamais ―
Lorand Gaspar, Cahier Lorand Gaspar, éditions Le Temps qu’il fait, Cahier Seize, sous la direction de Daniel Lançon, avril 2004, page 71.*
Note : ce poème a été publié en 2001 dans la collection Poésie/Gallimard : Lorand Gaspar, Sidi-Bou-Saïd, Patmos et autres poèmes, p. 43.
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24/09/2010
Oiseaux qui sont dans l’herbe en automne, de James Sacré
Une caille est un geste
lancé dans le bleu un carré
de petit lotier (dessin
d’un village hangar et des tuiles
entre deux branches) geste lancé
par-dessus le buisson derrière
caillou tombé de la grande herbe
une ombre où dans le silence
bat son cœur d’ombre où ?
La perdrix elle pourrait être un bruit
dans ce poème (silence un automne et la
couleur des regains) si les mots...
rien qu’un motif
au bord de l’imagination : tache automne
orangé en (silence) d’un coq de roche — Brésil
ou braise en mon trou natal ; perdrix
rouge dans un regain (pas d’Amazonie) parlé
de plus en plus gris.
Une caille est tellement loin mais
presque sous mon pied (luzerne
en septembre le temps doré des
petits cailloux blancs) autrefois aujourd’hui
quelle trace : un poème aussi soudain (blanc
de la page rempli derrière la vitre un autre
espace en automne un arbre et des
petits mots noirs) aujourd’hui demain
quelle trace. Le mot caille est tellement
Loin. Poème comme un fusil.
[...]
James Sacré, Paysage au fusil (cœur) une fontaine, repris dans Les Mots longtemps, Qu’est-ce que le poème attend ?, Tarabuste, 2003, p. 81-82.
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Art-ketype, création sur mesure
Mon métier de peintre décoratrice est sous certains aspects un métier de création et de recherche: rien n'est plus passionnant que de faire du sur mesure et de créer un décor qui affirme la personnalité de mes clients. On peut travailler les enduits et les patines avec une mutitude de couches, jouer avec la transparence, et ou les effets de matières. Chaque mur a son écriture...
Aussi je trouve intéressant la démarche de Pascale Bernet qui propose tant à des particuliers que des professionnels de la décoration de sortir d’une décoration standardisée en personnalisant le lieu à travers des créations artistiques originales. Elle accompagne et conseille dans le choix et la recherche d’une œuvre pour un lieu à l’intérieur comme à l’extérieur.
Sa complicité est telle avec des créateurs qu'elle peut leur demander de créer une oeuvre sur mesure. Bref, je vous invite à visiter son site www.art-ketype.com. Elle travaille avec de nombreux artistes!
17:25 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : artketype, création sur mesure | Facebook | Imprimer | | |
20/09/2010
Inspiration japonaise : le théâtre kabuki
Que vous évoquent ces couleurs: vert tilleul, sienne naturelle, noir bleuté et violet. Couleurs de terre ou végétales? De quel continent et pays?
Il s'agit de couleurs traditionnelles japonaises et plus exactement celles des rideaux du théâtre kabuki (du 17ème au 19 ème siècle), obtenues grâce à des teintures végétales. Les Japonais utilisent de manière très codifiée et sophistiquée les couleurs. Ils ont beaucoup utilisé les plantes tinctoriales et ont mis au point le principe de la sur teinture qui consiste à superposer et mélanger des couleurs. Cet orange est obtenu par le tanin du kaki, puis attenué par un rouge aditionné de noir.
On retrouve ces couleurs subtiles dans cette estampe d'Utamaro (1753-1806)
Autre exemple d'une estampe japonaise d'd'Hokusai (1760-1860) : une des vues du Mont Fugi parmi les 100 que ce peintre a peints.
En décoration, ces couleurs peuvent être interprétée de multiples façons...On est loin d'une ambiance japonaise!
06:52 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : conseil en couleurs, le théatre kabuki | Facebook | Imprimer | | |
09/09/2010
Enfance 1, tableau de Dominique Hordé
Je reviens aux couleurs que j'aime tant!, et la cinquantaine, je retourne en enfance....
116x89 cm. Acrylique, enduit, sable, papier, craie....sur toile
06:49 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tableaux dominique hordé | Facebook | Imprimer | | |
06/09/2010
Un sport et un passe-temps (extrait) de James Salter
C'est la France verte, bourgeoise. Nous roulons à une vitesse phénomènale. Nous passons sur des ponts, une brève série de martèlements. La campagne s'ouvre. Nous sommes en route vers des villes où personne ne va. Il y a de longues étendues couleur de blé, puis une terre verte, plane, étale et riche. Les fermes sont en pierre. La sagesse ancestrale veut que la terre soit la seule richesse qui compte, conviction qu'il n'y a lieu ni de remettre en cause, ni de changer. Pays dégagé, plat comme des terrain de jeux. Bouquets d'arbres.
Editions de l'Olivier.
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03/09/2010
La composition des peintures naturelles
La composition d’une peinture naturelle est variable d’un produit à l’autre. La peinture naturelle est fabriquée à partir de composants d’origine végétale et minérale.
- Liant à base d’huiles (de ricin, de lin, de chanvre…), de résines naturelles, de latex végétal ou de cires
- Solvant à base d’eau ou de terpènes d’agrumes
- Pigment à base de terres (ocre, terre de Sienne…), de minéraux, d’oxydes de métaux ou de végétaux
- Additif à base d’émulsifiants (lécithine de soja, amidon…), d’extraits de plante (huiles essentielles…), insecticides naturels (sel de bore, pyréthrine…) ou de siccatifs (de cobalt, zinc…).
L’utilisation de la peinture naturelle est identique à celle d’une peinture acrylique ou une peinture minérale. Les fonds doivent être propres: murs anciens lessivés, tâches isolées, trous et fissures rebouchés.
La seule différence se situe au niveau du temps de séchage, plus long pour une peinture naturelle et il faut en tenir compte.
Certaines peintures naturelles contiennent du terpènes d'agrumes, dont l'odeur peut déranger (Ce n'est pas nocif pour la santé comme les dérivés de pétrochimie, mais ça peut aussi provoquer des maux de tête.
Plusieurs marques sont présentes sur le marché: Natura, Auro, Biofa.
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01/09/2010
Exercices de style, de Raymond Queneau
Un jour, je me trouvais sur la plate-forme d'un autobus violet. Il y avait là un jeune homme assez ridicule : cou indigo, cordelière au chapeau. Tout d'un coup, il proteste contre un monsieur bleu. Il lui reproche notamment, d'une voix verte, de le bousculer chaque fois qu'il descend des gens. Ceci dit, il se précipite, vers une place jaune, pour s'y asseoir.
Deux heures plus tard, je le rencontre devant une gare orangée. Il est avec un ami qui lui conseille de faire ajouter un bouton à son pardessus rouge.
Visuel
Dans l'ensemble c'est vert avec un toit blanc, allongé, avec des vitres. C'est
pas le premier venu qui pourrait faire ça, des vitres. La plate-forme c'est sans
couleur, c'est moitié gris moitié marron si l'on veut. C'est surtout plein de
courbes, des tas d'S pour ainsi dire. Mais à midi comme ça, heure d'affluence,
c'est un drôle d'enchevêtrement. Pour bien faire faudrait étirer hors du magma
un rectangle d'ocre pâle, y planter au bout un ovale pâle ocre et là-dessus
coller dans les ocres foncés un galurin que cernerait une tresse de terre de
Sienne brülée et entremêlée par-dessus le marché. Puis on t'y foutrait une tache
caca d'oie pour représenter la rage, un triangle rouge pour exprimer la colère
et une pissée de vert pour rendre la bile rentrée et la trouille foireuse.
Après ça on te dessinerait un de ces jolis petits mignons de pardingues bleu
marine avec, en haut, juste en dessous de l'échancrure, un joli mignon bouton
dessiné au petit quart de poil.
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31/07/2010
La peau du monde, de René Daumal
Je vis et je vais m’interrogeant de la vie,
et l’image méconnaissable de moi-même,
ce monde d’air, de roc, de maisons, de lumières,
de millions de visages sans lois, sans voix
ce cuivre, ce bois verni, ces souffles, ces cris,
tournent, couleurs à fleur de peau,
formes touchées, mangées, où suis-je ?
(non, non, ce n’est pas une devinette,
hélas, ce n’est pas une devinette,
que ce soit ici ou ailleurs
je ne me reconnais plus.)
Ordre si fragile de la géométrie,
ne me prodigue plus les consolations de ton cœur de fer.
Ces jours, je vais dans les couleurs et les sons mêlés,
et je vois la nuit dans les plus vives lumières,
monde, monstrueux fantôme,
ton jour est la plus vide des nuits.
Une voix dit : ″où suis-je ? qui suis-je ?″
Est-ce ma voix dans ce désert ?
La surface de chaque chose
est tendue par la nuit qui la gonfle,
− Oh ! cette nuit en voiles de soleil !
Oui, cette parole dans la bulle d’illusion,
cette parole perdue,
ce n’est jamais que la mienne.
René Daumal, ″L’ennemi du jour », in Le contre-ciel, suivi de Les dernières paroles du poète, Poésie /Gallimard, n° 63, 1970, p. 141.
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30/07/2010
Feuillets, Ecrits 1, de Gustave Roud
Encrier renversé
tous mes morts vont flairer
ce sang noir
O caverne d’os au creux de mes deux mains
dégorge cette foule qui se lève en silence et
piétine ma pensée
ils vivent ils vivent ils
jaillissent de l’âcre odeur
Mais ma lampe saura les dévorer et tous ceux
qui triompheront de sa lumière je dessine ici
le lac magique de leur capture pour toujours.
L’exubérance, fleurs, feuillages, du milieu de juin n’est rien comparée à la puissante maturité qui saisit cette terre plus belle qu’aucun ciel. A la fin de juillet le ciel auparavant comme une lisse toile bleue se creuse soudain, gouffre sans un frisson où baignent les feuillages verts et noirs d’une dureté inexorable ; et lorsque août arrive, on voit vers le soir la lumière comme un fleuve fuir à l’horizon vers une mer inconnue et rendre à la voûte abandonnée sa transparence peu à peu chargée d’étoiles.
Gustave Roud, Feuillets, Écrits 1, Bibliothèques des arts, 1978, pp.27 et 30
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29/07/2010
La désillusion, de René Daumal
Blanc et noir et blanc et noir,
attention, je vais vous apprendre à mourir,
fermez les yeux, serrez les dents,
clac ! vous voyez, ce n’est pas difficile,
il n’y a là rien d’étonnant.
— Je vous parle sans passion,
noir et blanc et noir et blanc,
clac ! vous voyez qu’on s’y fait vite, je vous parle sans amour, et pourtant vous savez bien...
il faut être évident jusqu’à l’absurde —
Blanc et noir et blanc et noir et noir et blanc,
si nos âmes échangeaient leur corps,
il n’y aurait rien de changé,
alors ne parlez plus de corps ni d’âmes.
Blanc, noir, clac ! c’est la seule chose
qu’ensemble nous pouvons comprendre,
(mais n’est-ce pas qu’il n’y a là rien de tragique ?)
Je vous parle sans passion,
blanc, noir, blanc, noir, clac,
et c’est mon éternel cri de mourant,
ce cri blanc, ce trou noir...
Oh ! Vous n’entendez pas,
vous n’existez pas,
je suis seul à mourir.
René Daumal, Le contre-ciel, suivi de Les dernières paroles du poète, Poésie/Gallimard, 1970, p. 73-74.
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23/07/2010
L'azur, toujours l'azur!
La simple interrogation "Pourquoi le ciel est bleu ?" fait partie de ces questionnements scientifiques qui ont cheminé pendant des siècles, de Platon à Albert Einstein et Jean Perrin.
Derrière ce bleu du ciel, fascinant, apaisant ou inquiétant, souvent lié au céleste et au divin, se cache une couleur mystérieuse qui a touché la sensibilité romantique d’auteurs et d’artistes, et qui a taraudé, aussi, des érudits.
Et derrière la simplicité du ciel, une histoire s'est écrite et a révélé la subtilité de phénomènes atmosphériques, optiques, thermodynamiques… liés à la couleur de l'azur.
Une émission à écouter:
http://www.franceculture.com/oeuvre-d-ou-vient-le-bleu-du...
Un livre à lire : D'où vient le bleu du ciel? de Peter Pesic (Edition Vuibert, 2010)
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16/07/2010
Le Domaine des morts, de Maurio Fabi
La déchirante beauté d'un arbre
qui meurt lequel
retient encore un peu ses feuilles
cette grâce distante que seul ce
qu'on abandonne affecte de posséder
ces couleurs implicites qu'ont les choses
quand elles s'achèvent
la vie qui est autour de lui dans le bois
le chant des branches et l'horizon
la vallée,
le spectacle incroyable
antique et nouveau d'un crépuscule.
*
Rêver de mourir d'être mort de
mourir peu à peu
dans un lit à peine fait
avec les enfants qui jouent
dans la pièce à côté
le bruit feutré des pantoufles sur les
escaliers
une chaise qui se déplace l'odeur
de choses qu'on devra abandonner
la hâte de celui qui t'aime
ce passage imperceptible
d'une saison à l'autre
d'une vie à l'autre qui s'annonce
dans un coup de vent
dans la tache de lumière qui s'agrandit
sur le plancher.
* * *
La struggente bellezza di un albero
che muore il suo
trattenere ancora un poco le foglie
quella grazia distante che solo ciò
che si abbandona mostra di possedere
quei colori impliciti che hanno le cose
quando si esauriscono
la vita che gli sta intorno nel bosco
il canto delle fronde e l'orizzonte
la valle,
lo spettacolo incredibile
antico e nuovo di un tramonto.
*
Sognare di morire di esser morto di
morire a poco a poco
in un letto appena fatto
con i bambini che giocano
nella stanza accanto
il rumore felpato di pantofole sulle
scale
una sedia che si sposta l'odore
di cose che si dovranno abbandonare
la premura di chi ti vuole bene
quel passaggio impercettibile
da una stagione all'altra
da una vita all'altra che si annuncia
in un colpo di vento
nella macchia di luce che si allarga
sul pavimento
Mauro Fabi, Le Domaine des morts, traduction Olivier Favier, Alidades, (extraits).
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15/07/2010
Chute, de Jean-Jacques Viton
on ne mesure pas le lent-vite
la chute ne s'improvise pas
l'espace du chuteur est mal défini
on ne mesure pas le lent-vite
sur la ligne du sens unique
uniforme puzzle de vitesse
monté par miettes de visions
un seul mouvement sans pauses
n'importe où dans l'espace
pieds détendus parallèles l'un à l'autre
genoux et ventre relâchés et ouverts
colonne vertébrale longue et large
l'homme d'aplomb traverse ainsi l'espace
son visage s'expose comme une fleur
buste un peu arqué sur l'axe obligé
bras tendus vers le bas ou le haut
bolide isolé vivant encore d'apparence
il passe des zones de dérèglements
allongé sur une surface neuve
échappé d'un arrêt sur image
filant immobile vers son futur
triangle blanc du visage aux yeux fixes
au sourire fermé imperceptible
l'homme d'aplomb croit à cet élan
il ne peut rien saisir au passage
ni rampe ni ce qui s'accomplit
le réel ne l'attrape pas
il n'y a pas d'ange sur son chemin
un fil noir un noir sans marge
il peut s'y croire abrité
pour croire dans le noir pour tout éviter
il se passe beaucoup de rien
pendant la chute la peau elle
se dégage et y va seule
tout se ferme sous la peau
du côté qui va tout prendre
dans la chute on se prépare à tout
c'est compliqué elle ne se modifie pas
pas de trait d'union un unique tracé
on se demande si ça arrive
situation inimaginable il faudrait
recommencer la figure retenir la sensation
du départ de l'endroit fixe
et de l'entrée dans le nouvel espace
pénétrer dans l'espace en fusion avec tous ceux
qui traversent l'espace
forage d'un pays inconnu à langue étrange
jamais perçue jamais prononcée
la chute c'est un incomparable silence
on s'y perd dans cet élan
rêver l'étreinte vient des arbres
(…)
Jean-Jacques Viton, selected sueurs, éd. P.O.L, 2010 (125 p.) pp 55-59
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13/07/2010
Bleu, bleu, le ciel de Provence, de Marcel Amont
Blanc, blanc, blanc, le goéland
Le bateau blanc qui danse
Blond, blond, le soleil de plomb
Et dans tes yeux
Mon rêve en bleu , bleu, bleu
Quand j'ai besoin de vacances
Je m'embarque dans tes yeux
Bleus, bleus, comme un ciel immense
Et nous partons tous les deux.
Bleu, bleu, le ciel de Provence
Blanc, blanc, blanc, le goéland
Le bateau blanc qui danse
Blond, blond, le soleil de plomb
Et dans tes yeux
Mon rêve en bleu, bleu, bleu
Quand le vent claque la toile
De ton joli jupon blanc
Blanc, blanc comme une voile
Je navigue éperdument.
Bleu, bleu, le ciel de Provence
Blanc, blanc, blanc, le goéland
Le bateau blanc qui danse
Blond, blond, le soleil de plomb
Et dans tes yeux
Mon rêve en bleu, bleu, bleu
Tes cheveux d'un blond de rêve
Déferlent en flots légers
Blonds, blonds, blonds sur une grève
Où je voudrais naufrager
Bleu, bleu, le ciel de Provence
Blanc, blanc, blanc, le goéland
Le bateau blanc qui danse
Blond, blond, le soleil de plomb
Et dans tes yeux
Mon rêve en bleu, bleu, bleu
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09/07/2010
Pour un verger, de Jacques Reda
Claude Monet (origine non connue)
Poème : le seul lieu comparable à ce trouble
Heureux qui ressaisit, le soir, près d'un verger,
Ifs et roses, l'espoir souvent déchiré, double
Lumière qui s'éloigne et veut nous héberger.
Infaillible refuge, et pourtant illusoire :
Pentes au loin plus délicates qu'un bleuet,
Pures voix des enfants dans l'air lavé d'histoire,
Et le mot "mort" comme un oiseau soudain muet
Jugeant du recoin sombre où rien n'en fait accroire
A la nuit qui sourd et déjà, dans la clarté,
Crachait son encre sur la page dérisoire –
Cris en bas, soubresauts du jour décapité.
Or nier l'ombre affaiblirait cette lumière
Timide qui résiste et semble sur nos mains
Trembler tel un reflet d'étoile dans l'ornière.
Elle appelle. Comme une voix sur ces chemins
Troués de mots qui n'ont pas pu la garder prisonnière.
Jacques Réda, Premier livre des Reconnaissances. Fata Morgana 1985, p. 33.
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